Survivre à une fausse couche
Il y a celles qui essayent deux fois, tombe enceinte et accouche 9 mois plus tard d’un magnifique bambin. Et puis il y a les autres. Celles pour qui l’accès à la maternité n’est pas un long fleuve tranquille. Aujourd’hui nous avons voulu aborder le sujet des fausses-couches. Un sujet qui nous semble tabou alors qu’il touche plus d’une femme sur trois. Vous avez été nombreuses à répondre à notre appel sur Instagram, à nous confier vos histoires, votre peine et vos espoirs. Merci beaucoup ! Il est temps de partager vos récits afin qu’ils puissent éclairer le chemin d’autres femmes.
Acte 1 : l’heureux événement
Ça y est, c’est décidé, vous voulez un enfant. Parfois vous mettez six mois, un an, un mois… Quoi qu’il en soit, un test de grossesse et une prise de sang plus tard, c’est confirmé : dans 9 mois vous êtes parents ! Comme dit Shanah, dès les premiers tests, « on se projette… La chambre.. être parent avant 40 ans etc ». Une nouvelle aventure commence et vous vous sentez déjà maman.
Acte 2 : le doute
Mais après les premiers signes de grossesse, les tests et la joie, certaines inquiétudes apparaissent. Des pertes de sang, un changement corporel, une intuition, un fort mal de ventre (notamment pour les GEU)… « Un ascenseur émotionnel porté par les hormones » nous confie Sophie. Le doute s’immisce. Est-ce normal de perdre du sang, de ne plus rien sentir ou d’avoir aussi mal ? Pour vérifier ces symptômes qui font penser à une fausse couche, vous filez voir votre gynécologue.
Acte 3 : la visite médicale
Lors de cette visite médicale, effectuée chez votre gynéco ou aux urgences, une échographie est faite systématiquement. Elle permet notamment de vérifier la croissance d’un embryon, s’il s’agit d’un oeuf clair (un embryon qui ne s’est pas développé), d’une grossesse extra-utérine (GEU), d’entendre le coeur du bébé (audible à partir de 7 semaines d’aménorrhée) etc… Et pour compléter, on peut vous prescrire une prise de sang afin de vérifier le taux de bêtaHCG.
Anne nous raconte son rendez-vous « Mon gynéco est resté très pro, mais très froid. Il a fait son examen, constaté la fausse couche et à la fin juste un « Reposez-vous un peu » sur le pas de la porte de son cabinet. » Aux urgences, c’est la même histoire « Le gynéco de service m’a auscultée. Tout en tenant la sonde dans mon vagin d’une main, il tenait son téléphone de l’autre et hurlait des ordres à une infirmière. La situation était tellement irréelle qu’elle a eu le mérite de nous faire rire avec mon mari. » narre Sophie.
Des histoires comme ça, vous nous en avez envoyées beaucoup (même si certaines équipes étaient parfaites). Mais souvent, vous vous retrouvez face à manque d’empathie, de tact, de temps et d’expérience alors que vous avez besoin de compassion et d’explication.
Emilie fait le même constat « Le parcours de soin est nul pour une fausse couche avant les 3 mois car il n’y a pas de suivi. J’ai du aller aux urgences deux fois car les sages femmes ou gynéco ne peuvent pas accompagner médicalement une fausse couche » .
Si la FC est banale et commune pour le corps médical, elle ne l’est pas pour vous. C’est un épisode traumatisant qui signifie la perte d’un futur bébé, « Notre petit monde s’écroule très vite » confirme Shanah. Face à cette maladresse, on se sent seule, perdue et même en colère.
D’autant plus qu’on est souvent pressé pour la suite… À savoir, évacuer l’embryon. N’étant pas médecin, nous n’allons pas vous expliquer les différents cas de figure, mais plutôt vous guidez vers des solutions concrètes pour vous relever.
Acte 4 : se réparer
Et après ? Après une fausse couche, on prend du temps pour soi, pour se réparer. « La naissance de mon fils a été une énorme claque après deux fausses couches. J’ai réalisé tout l’amour que j’aurai pu avoir bien plus tôt, si j’avais eu mes autres bébés. J’ai passé 3 mois à pleurer et à faire mon deuil alors que j’avais un super enfant en pleine forme. » nous raconte Sophie.
S’autoriser à pleurer
Oui, vous vivez un deuil. Vivre une fausse couche est douloureux physiquement et moralement. Vous avez le droit de vous écrouler et de pleurer comme le dit Mathilde : « Je regrette de m’être interdit d’être malheureuse, ça a été beaucoup mieux quand j’ai accepté que j’étais malheureuse, parce qu’on est maman dès le test au final. »
S’avoir bien s’entourer et en parler
On ose rarement parler de ses fausse couches ou projet bébé. Parce que c’est douloureux, qu’on veut garder la surprise, qu’on a honte… Et pourtant le silence et la solitude qui entourent la fausse couche sont vos plus grands ennemis. L’un des remèdes clés est justement d’aborder le sujet, encore et encore et si possible avec des femmes qui sont passées par là #sororité
« Difficile de vivre cela avec son conjoint.e car même si l’autre est très impliqué.e il.elle ne vit pas les choses de la même manière car ça ne se passe pas son corps. Il n’y pas cette couleur corporelle, ces hormones qui vous rendent sensibles à tout… » dit Emilie. Les conjoints mettent souvent plus de temps à se projeter dans la paternité. Et dans ce cas précis, prenez le positif : ils restent forts pour vous soutenir pendant que vous vous écroulez.
Vous nous avez aussi parler des remarques maladroites. « Quand on me demandait, alors le deuxième ? Oui oui on y pense mais j’ai fait une fausse couche… Ça met les gens mal à l’aise » raconte Léa… Difficile d’échapper à certaines questions, mais n’hésitez pas à y répondre sans phare car en parler c’est aussi aider les autres !
Déliez les langues autour de vous. Osez aborder ce sujet et vous vous rendrez compte que ça arrive à des tas d’amies, à leurs connaissances, aux amies d’amies. Vous n’êtes pas seule. Et enfin, écoutez des podcasts qui abordent le sujet comme Bliss.
Arrêter de culpabiliser
Lorsque l’on demande les causes des FC à son médecin, il répond souvent « la faute à pas de chance » ou au contraire que « la nature est bien faite ». Ces paroles sensées consoler n’apportent que peu de confort. Alors vous vous demandez si quelque chose ne cloche pas chez vous. Vous parlez beaucoup de culpabilité. Certaine s’en veulent de leur acte du passé, d’autres de ne pouvoir apporter à leur partenaire un enfant, d’autres de ne pas arriver à « garder » un bébé. « J’étais si triste ! Je pensais que la vie voulait me punir d’avoir avorté, que jamais plus je ne pourrai avoir d’enfant » explique Ophélie.
Ce sentiment est une fois de plus lié au tabou autour de la fausse couche. Puisque personne n’en parle, les femmes ont l’impression d’être les seules. Alors qu’en réalité, plus d’une femme sur trois vivra une fausse couche. Vous n’êtes ni seule, ni responsable.
Reprendre confiance en soi et son corps
Non, votre corps n’y est pour rien et vous n’êtes pas responsable. Ce sentiment de culpabilité qui vous accompagne est parfois tenace mais surtout injustifié. « Je n’avais plus confiance dans mon corps qui m’avait trop trahie (alors qu’en fait, il m’a peut-être sauvé). Je me suis mis à faire du sport et me suis lancée un challenge : faire une course à pied de 10 km. J’ai senti une immense fierté après avoir réussi, ça m’a donné des ailes ! » raconte Sophie.
Mettre en place un rituel d’au-revoir
Ne pas hésiter à procéder à un enterrement, même symbolique. « Faire une mini cérémonie pour dire adieu à l’embryon qui a nourri beaucoup d’espoir avant de s’éteindre. Allumer des bougies, prendre une douche en pleine conscience de soi et son corps qui a porté la vie même brièvement. Cueillir une fleur et la regarder s’envoler au gré du vent. Dire au revoir seul.e ou accompagné.e de ses proches… » conseille Emilie.
Prendre soin de soi
Ensuite, il faut consulter des professionnels de santé pour soigner son mental et son corps comme vous nous le suggérer « Trouvez une équipe de professionnels qualifiés qui vous conviennent, notamment avec un minimum d’empathie et de suivi psychologique. J’ai consulté un psy, une magnétiseuse/guérisseuse qui m’a beaucoup apaisée, une ostéopathe en intra pour nettoyer les tissus et les préparer à la fois suivante. »
Acte 5 : la force et l’espoir
Derrière l’épreuve, vous tirez toutes du positif : des choix confortés « Au moins nous étions certains de notre projet bébé et de notre couple » (Emilie), une nouvelle force et surtout, une fin heureuse : « Après cette fausse couche, le corps a pris son temps et est reparti. Notre petit garçon est né en plein en forme en juillet » Anne.
Merci encore pour vos témoignages, n’hésitez pas à réagir et à nous envoyer vos histoires sur Instagram.